En 2010, est sorti sur les écrans français (au cinéma) un film de Roselyne Bosch « La Rafle » avec Jean Reno, Gad Elmaleh et Mélanie Laurent.
De nombreuses années ont passé avant que la très grande majorité des Français reconnaissent le rôle coupable de la police française et par conséquent du gouvernement antisémite du Maréchal Pétain, héros de la 1ère guerre mondiale. Il a fallu attendre le 16 juillet 1995 pour qu’un Président de la République Française, Jacques Chirac, reconnaisse la responsabilité de l’Etat Français dans les actions odieuses menées contre les Juifs – au-delà de ce que demandaient les Allemands à cette période en France -. C’est une page de leur histoire que les Français ont eu beaucoup de mal à regarder en face.
Le discours de Jacques Chirac juillet 1995 ↑ cliquez ici !
En été 1942, la France est occupée par les Allemands depuis 2 ans.
Les 16 et 17 Juillet 1942, 4500 policiers sont mobilisés pour aller chercher les Juifs partout où ils se trouvent dans Paris, aussi bien les Juifs étrangers que français. 50 bus sont réquisitionnés pour amener les Juifs jusqu’au vélodrome d’hiver (un endroit très connu des Parisiens pour les courses cyclistes – le Vél’d’Hiv’). Pendant 5 jours, plus de 13000 personnes – enfants, vieillards, femmes, hommes – vont être entassés dans cet espace bruyant et nauséabond. Très rapidement ces pauvres gens n’ont plus rien à manger, ni à boire. Ils ne disposent même pas de toilettes. Parmi toutes ces personnes, il y a 4000 enfants.
Tous ces gens seront envoyés par wagons entiers d’abord dans des camps d’internement français comme ceux de Beaume-La-Rolande, de Pithiviers ou Drancy, avant d’être conduits vers la mort à Auschwitz, les enfants séparément de leurs parents.
Je vous propose cette vidéo pas très récente mais qui retrace bien cette période horrible.
Le texte de la vidéo ci-dessous ↓
Paris – 16 juillet 1942
Des images presque oubliées de l’histoire. 16 juillet 1972, trente ans après il ne reste que cette plaque de la grande rafle du Vel’d’Hiv’
Le célèbre vélodrome d’hiver où se retrouvait le Paris sportif a été détruit en 1959 comme pour effacer un cauchemar. Le cauchemar de 30 000 juifs ( parqués dans le Vél’ d’Hiv’ devenu en juillet 1942 l’antichambre de la mort. Mais il reste les survivants, à peine une cinquantaine perdus ici dans la foule, Les survivants de la plus grande opération de police que Paris aie connue depuis l’arrestation des Templiers (1307 ) et la Saint-Barthélemy (1572). Opération confiée par Eichmann au Obersturmführer Danneker. C’est la première étape de la solution finale, celle de l’anéantissement des juifs européens. L’heure H, quatre heures du matin. L’opération a été baptisée cyniquement « Vent printanier ». Au petit jour, Paris est investi par la police parisienne, la police de Vichy qui s’est chargée des préparatifs et de l’exécution. 9000 hommes. Le gros des forces est concentré dans ces trois arrondissements (4e / 11e / 20e arrondissements). C’est là que réside la majorité de la population juive de Paris.
– Je suis en effet parti le matin de bonheur pour aller au Centre Amelot où je travaillais dans un dispensaire juif qui servait d’ailleurs de couverture à une action de résistance dont beaucoup se souviennent encore. Et ce qui m’a surpris, et pas tout à fait surpris en vérité, c’était le spectacle de ces pauvres gens que l’on voyait sortir des différentes maisons avec des valises et des ballots à la main et qu’on dirigeait vers des autobus qui les emmenaient … nous ne savions pas encore où mais nous avons appris par la suite que c’était notamment au Vélodrome d’Hiver où 7000 d’entre eux ont été rassemblés. Si je dis que je n’ai pas été entièrement surpris c’est parce qu’il ne faut pas oublier que nous vivions alors une période où les rafles étaient quotidiennes.
16 et 17 juillet 1942
Une seule photo retrouvée de ces horribles journées.
Des bus remplis de Juifs arrêtés chez eux (hommes femmes et
enfants) et conduits quelques jours plus tard dans le camp d’extermination d’Auschwitz
– Mais le 16 juillet c’était différent ?
– Le 16 juillet a été différent…jusque-là nous savions que des rafles avaient lieu. Il y en avait eu d’importantes, des milliers d’arrestations mais cela concernait surtout des hommes. Et cette fois-ci, il semble bien que sur les 28000 noms qui ont été fichés pour cette grande rafle, il n’y avait pas de distinction du tout. Tout le monde devait être raflé et emmené, nous l’avons su par la suite, au Vélodrome d’Hiver où la plupart d’entre eux avaient été parqués. Il y avait 4000 enfants parmi eux.
Sur les 4000 enfants parqués au Vél’ d’Hiv’ quelques survivants. Lazar Pitkovich avait 14 ans en 1942. Arrêté avec ses parents, il s’évade quelques heures plus tard.
– Voilà comment cela s’est passé. Les mères de famille, qui n’avaient plus rien à donner à boire à leurs enfants, se sont rassemblées devant cette porte qui était là dans le Vél’ d’Hiv’ avec leurs enfants, leur poupon sur les bras. Les enfants en général pleuraient parce qu’il faisait une chaleur torride. Ils avaient soif. Il n’y avait plus d’eau dans le Vélodrome d’Hiver et comme – vous le voyez, elle existe encore – cette épicerie était juste en face, la rue n’est pas grande…elles se sont rassemblées et disons par la force qu’elles représentaient elles ont forcé le petit cordon de police qui était là et elles ont simplement été dans cette épicerie. J’ai donc profité de ce moment où la police s’occupait essentiellement de ramener ces femmes…
– Il n’y avait pas de policiers allemands ?
– Non, pas de policiers allemands, uniquement des policiers français.
– Comment avez-vous fait ?
– Et donc, à ce moment-là, du fait que tous les policiers qui étaient dans ce hall à ce moment-là se sont portés de l’autre côté de la rue. Donc, il n’y avait plus personne devant cette porte et j’en ai donc profité. Je suis sorti normalement et j’ai vu que personne ne me voyait parce qu’ils étaient occupés à ramener ces femmes. Mais ces femmes… vous savez quand il s’agit de défendre son enfant, les policiers ne comptaient pas beaucoup. Effectivement, elles sont restées dans la boutique et elles ont pu acheter l’eau minérale dont avaient besoin leurs bébés et ensuite elle sont retournées. Mais moi, à ce moment-là, j’avais déjà quitté la porte. Vous voyez cette petite rue qui est là, dont je ne connais même pas le nom exact, donc la première petite rue à gauche je l’ai prise.
Quatre enfants s’évadent ainsi. Dans le même temps, 57 bus déposent leur cargaison. Des centaines de familles, des pleurs, des cris. L’image du Vél’ d’Hiv’ dira un survivant est celle d’un bateau en détresse. Deux médecins juifs se souviennent.
– Je me rappelle un cas de scarlatine. Je me rappelle un cas de femme enceinte sur le point d’accoucher. Je me rappelle les cris et les pleurs des enfants.
– Je vois arriver des gens, de grands malades, des contagieux, des gens qui avaient les stigmates de la scarlatine par exemple, des grands rhumatisants qu’on amenait sur des brancards. De véritables grands malades et pour essayer de les faire sortir, je me dirige vers le service médical de la préfecture qui était composé d’un médecin et de quelques infirmières de la Croix Rouge. J’expose la situation mais à chaque fois c’est un refus absolu, un refus de traiter ces malades et un refus de les évacuer.
L’évacuation se fera six jours plus tard pour Drancy et Auschwitz. Entretemps, il y a eu 107 suicides.
30 ans après, quelle leçon peut-on tirer de ces évènements ?
– D’abord, on n’a pas le droit d’oublier. Il y a deux choses, oublier et pardonner. L’oubli, nous n’en avons pas le droit. Alors, quant au pardon, il faut distinguer. Je ne pardonne qu’à ceux qui me demande pardon. Indépendamment de cela, le pardon est une bouffonnerie. Ce n’est pas maintenant qu’on a envie de pardonner quand on voit des hommes comme Touvier gracié, rentrer en possession de leurs biens, se promener librement et bénéficier d’une grâce vraiment inexplicable. La première condition c’est d’abord que les criminels expient et qu’on nous demande pardon. Et la deuxième condition est la suivante : le pardon ne peut venir que de ceux qui ont souffert.
– Donc la plaie est toujours ouverte ?
– 30 ans après la plaie est toujours ouverte évidemment. Les 30 ans ne font rien à l’affaire. Pensez aux 6 millions de juifs assassinés, pensez aux fours crématoires. Je pense que le problème est toujours pendant et la blessure fait toujours aussi mal.
Entre les 16 et plus de 13 000 personnes, dont près d’un tiers étaient des enfants, ont été arrêtées dans Paris et sa banlieue ; presque tous ont été assassinés, moins de cent ont survécu à leur déportation.
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