Ingres était un peintre néoclassique français, élève du célèbre peintre David (« Marat assassiné », « Madame de Récamier »…). À la deuxième tentative, il remporte le prix de Rome en 1801.
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La période révolutionnaire commence cette année 1789 avec la réunion des États généraux en mai et la prise de la Bastille le 14 juillet pour se terminer en l’an VIII (1799) avec le coup d’état du 18 brumaire (9 novembre 1799) de Napoléon Bonaparte. Les évènements qui vont succéder au 14 juillet 1789 ont ébranlé toute l’Europe et le monde. Une révolution des esprits s’est produite depuis déjà quelques années et c’est un homme nouveau, citoyen, qui va naître de ces évènements.
Après que le tiers-état ait fait l’affront au roi de créer une assemblée nationale en juin 1789, nommée ensuite assemblée constituante, on pourrait croire que la situation s’est apaisée, que le roi Louis XVI a finalement accepté ce bouleversement de la vie politique et que la France se dirige vers une monarchie constitutionnelle comme le modèle anglais de cette époque.
MAIS
C’est oublier un peu vite qu’il souffle un vent de liberté dans les esprits depuis quelques années déjà grâce à des philosophes comme Voltaire, Diderot, Rousseau…(1) et aussi que le peuple a peur d’un complot des aristocrates. Ces nobles sont tellement attachés à leurs privilèges qu’ils pourraient bien rétablir la société de l’ancien régime en s’appuyant sur les troupes armées soit 30 000 soldats qui sont en attente autour de Paris et Versailles.
Pour les 200 ans de la Révolution française, deux très bons films ont été réalisés en 1989 : . la 1ère partie « Les années lumière » réalisé par Robert Enrico . la 2ème partie « Les années terribles » réalisé par Richard T. Heffron (voir YouTube)
Après le renvoi par le roi du très populaire ministre des finances Necker le 11 juillet, les Parisiens révoltés se sont mobilisés. Des affrontements ont lieu avec la cavalerie du Royal Allemand commandée par le Prince de Lembesq le 12 juillet. Bizarrement, les soldats se retirent, sans doute pour éviter un bain de sang, ce que souhaite éviter Louis XVI. Le 13 juillet, les Parisiens incendient des barrières douanières qui taxent toutes les marchandises qui entrent dans Paris.
Pendant ce temps, un Comité permanent est créé à l’hôtel de ville et une milice bourgeoise de 48000 hommes s’organise pour contrer les débordements de la foule en colère. Mais pour créer une milice, il faut des armes et pour le peuple qui a peur il faut des armes aussi !
Pour expliquer cette journée très importante de l’Histoire de France qui est considérée comme le début de la Révolution française, il vaut mieux prendre la suite des évènements heure par heure.
Vers 9 heures du matin à Paris
Environ 50 000 Parisiens se dirigent vers le plus vaste dépôt d’armes de Paris les « Invalides ». Là, sont entreposés entre 20 et 30 000 fusils et 24 canons. Une délégation demande à parler au gouverneur des Invalides pour lui réclamer des armes. Celui-ci explique que c’est impossible et qu’il lui faut un ordre écrit de Versailles.
Mais les invalides qui défendent cet endroit ne semblent pas disposés à se servir des canons pour tirer sur le peuple si l’ordre est donné. De plus, tout près de là au Champ de Mars, les soldats du régiment des gardes françaises, eux non plus ne sont pas prêts à tirer sur le peuple si une intervention est décidée pour mater l’insurrection.
Des fusils et des canons aux Invalides
Voyant les troupes armées qui ne réagissent pas, les émeutiers comprennent que rien ne les arrêtera et pénètrent en masse aux Invalides dans la confusion générale portés par la fureur et l’envie de se protéger avec des armes. Ils découvrent dans ce bâtiment deux kilomètres de souterrains. Ils s’emparent des fusils et des canons et comme ils n’ont pas de munitions ni de poudre, ils se dirigent vers la Bastille où ils sont sûrs d’en trouver. (3)
10 heures
De la poudre et des munitions à la Bastille
La Bastille, c’est un château fort qui domine le faubourd Saint-Antoine, quartier où de graves incidents se sont déjà produits le 28 avril 1789 faisant plus de 200 morts et 300 blessés. Il posséde 8 tours. Pour y accéder, on doit d’abord entrer dans une première cour « La cour de passage ». Après deux petits ponts-levis, on arrive dans une deuxième cour « la cour du gouvernement » puis il faut encore franchir deux ponts-levis parallèles avant d’accéder à l’intérieur de la Bastille.
La prison d’état de la Bastille est un monument que les Parisiens détestent depuis longtemps et qui représente le symbole du pouvoir absolu puisqu’un grand nombre de Parisiens pensent que cette prison est remplie de prisonniers détenus arbitrairement. Mais il ne sont pas venu détruire le monument, ils sont juste venus chercher de la poudre et des munitions.
Cette Bastille est gardée par 82 vétérans et est gouvernée par le marquis Bernard René Jordan de Launay, 49 ans, qui va montrer au grand jour son inaptitude à donner des ordres cohérents et son manque de sang-froid au cours de cette journée mémorable . En plus des vétérans, le gouverneur, constatant l’agitation des Parisiens depuis quelques jours, a demandé le renfort de 33 gardes suisses.
10 h 30
Pendant que les Parisiens armés de fusils sans munitions quittent les Invalides pour rejoindre la Bastille, le Comité de l’Hôtel de Ville décide d’envoyer une délégation de 3 hommes à la Bastille pour demander qu’on retire les canons du sommet des tours pour ne pas provoquer des Parisiens surchauffés.
De Launay n’a pas l’intention de donner les munitions et la poudre mais il accepte sans mal de retirer les canons du haut des tours et propose même à la délégation de partager son repas avec lui. . Dehors, la foule s’énerve, c’est beaucoup trop long. Que se passe-t-il à l’intérieur ? La délégation a-t-elle été retenue prisonnière, ou bien leur fait-on du tort, ou bien même sont-ils en train de pactiser avec l’ennemi ?
11 h 30
À l’Hôtel de Ville, on s’inquiète. Une deuxième délégation est envoyée au moment où la première délégation sort de la forteresse couverte d’injures et retenue par les émeutiers. A nouveau, les délégués parlementent avec le gouverneur. Ils demandent que les canons soient descendus des tours et surtout qu’on ne fasse pas la guerre à la « nation ». Ils proposent aussi une garde bourgeoise pour aider à défendre le fort.
Les Parisiens, à l’extérieur, qui n’étaient venus que pour prendre les munitions et la poudre accumulent la haine à force d’attendre et beaucoup sont prêts à s’emparer de la Bastille.
13 h 00
La deuxième délégation à rejoint l’Hôtel de ville. Le Comité permanent décide de rédiger une proclamation assurant au peuple que le gouverneur ne fera aucun usage de ses armes MAIS SOUDAIN un coup de canon retentit, il est 13h30.
Que s’est-il passé ? Une méprise qui aggrave la situation
La foule est tellement dense devant la Bastille que beaucoup ne savent rien des pourparlers entre l’Hôtel de Ville et le gouverneur De Launay. Excédés d’attendre, certains sont montés sur le toit d’une maison séparant les deux cours d’accès à la forteresse et sont parvenus à abattre le premier pont-levis. Les émeutiers s’engagent alors dans la Cour du gouvernement et arrivent au pied de la Bastille. L’arrière de la foule, n’ayant pas vu que ce sont deux des leurs qui ouvrent le passage, est persuadée que le gouverneur veut faire pénétrer les assiégeants dans la dernière cour avant la prison pour les mitrailler.
Vraisemblablement, c’est en haut des tours que l’ordre a été donné de tirer sur la foule. Les tirs du haut de la Bastille sont peu nourris, les invalides et les gardes suisses font surtout des tirs de dissuasion et agitent leur chapeau pour faire comprendre aux émeutiers de reculer.
14 h 00 Une troisième délégation de l’Hôtel de Ville arrive mais les combats l’empêche de parvenir au pied de la forteresse. Les émeutiers ont envoyé des charettes en feu contre le logement du gouverneur ce qui cause des désagréments aux assaillants aveuglés par la fumée et écrasés par la chaleur du feu et celle de cette après-midi d’été.
15 h 00
Pour garder le contrôle des évènements et un ascendant sur le peuple, le Comité de l’Hôtel de Ville envoie une quatrième délégation qui arrive à la Bastille munie d’un drapeau blanc. Les pourparlers sont confus et des coups de feu atteignent la nouvelle délégation. Le peuple s’échauffe encore plus !
Côté Bastille, le gouverneur De Launay, incapable de prendre des décisions cohérentes, ne sait pas quoi faire et panique. Faut-il défendre sérieusement le fort ou se rendre ? Il choisit la pire des solutions, la solution intermédiaire. Il se retranche dans sa forteresse et ne se défend pas assez durement pour décourager les assaillants.
Comédie musicale : 1789 – Les Amants de la Bastille
15 h 30 Un fait nouveau. Une soixantaine de soldats des gardes françaises arrivent avec 5 canons pris aux Invalides le matin suivi d’une colonne de citoyens armés et encadrés. Fini le désordre et les initiatives personnelles. On retire les charrette en feu et on installe les canons. Les Parisiens sont plus déterminés que jamais maintenant à détruire la Bastille. Les canons des assiégeants commencent à tirer.
AUCUNE AIDE NE VIENT DE L’EXTÉRIEUR POUR AIDER LE GOUVERNEUR DE LAUNAY AFFOLÉ, AUCUNE CONSIGNE DU ROI. Complètement perdu, ne sachant que faire, De Launay s’agite et décide de faire sauter tout. Son entourage le maîtrise pour ne pas qu’il en arrive à cette extrémité.
16 h 30 A l’intérieur de la Bastille, on capitule. On souhaite arrêter la résistance et on cherche quelque chose qui pourrait ressembler à un drapeau blanc. Finalement, une serviette est agitée au son du tambour pendant près d’un quart d’heure en haut des tours. La foule a fini par voir le signal d’arrêt des combats. Le calme revient.
Par une petite ouverture dans le pont-levis de la forteresse, on demande à ce que la garnison sorte avec les honneurs de la guerre. Les assaillants refusent. Tous crient : « Abaissez les ponts ! ».
Puis un message du gouverneur est passé par l’ouverture. Pour récupérer le message sans abaisser le pont-levis, une grande planche est installée qui franchit le fossé. Un premier révolutionnaire tombe grièvement blessé. Un autre arrive à saisir le message : « Nous avons 20 milliers de poudre, nous ferons sauter le fort, la garnison et les environs si vous n’acceptez pas la capitulation ».
La foule refuse et crie « Abaissez les ponts ».
17 h 00 Puis, surprise, le petit pont-levis s’abaisse. Quatre invalides ont décidé d’ouvrir les portes. Le grand pont-levis est lui aussi abaissé et c’est une ruée indescriptible d’hommes remplis de haine qui s’engoufrent dans la forteresse et qui la pillent et la saccagent. Fureur et confusion font que certains des assiégeants se font tirer dessus par d’autres assiégeants qui les ont pris pour des membres de la garnison.
On s’empare de De Launay et de son second et on les conduit à l’Hôtel de Ville protégés par quelques insurgés et soldats de la Garde française qui veulent éviter le lynchage. Hélas, De Launay n’a pas le temps de monter les marches de l’Hôtel de Ville. La foule s’empare du gouverneur et le met à mort à coups de pieds, de baïonnette, de pistolet. Puis un garçon cuisinier tranche la tête du cadavre avec son canif. D’autres exécutions sommaires se passent dans les rues autour.
À l’Hôtel de Ville, Flesselles, le prévôt de marchands (4) est accusé de ne pas avoir soutenu le peuple pendant le siège et doit aller s’expliquer au Palais Royal. Flesselles n’a pas le temps de s’y rendre. Il est abattu sur les marches de l’Hôtel de Ville en sortant.
Et les prisonniers de la Bastille ?
Les révolutionnaires doivent défoncer les portes des cellules car, dans leur enthousiasme, des émeutiers sont partis avec toutes les clés de la prison de la Bastille pour les brandir avec fierté dans les rues de la capitale. Une fois les portes de cellules abattues, c’est la consternation. Ils pensaient que la prison regorgeait de prisonniers. Il n’y a en fait que sept détenus : deux fous, quatre faussaires et un criminel. Dans la confusion les faussaires et le criminiel s’échappent et il ne reste que les deux fous que la foule va quand même porter en triomphe. Puis, rapidement, ils vont être réenfermés à un autre endroit le lendemain.
Les deux têtes de Flesselles et Delaunay sur des pics sont promenées toute la nuit dans les rues de Paris.
Des hommes ivres de fatigue et d’alcool après une nuit et une journée de tension extrême et d’efforts intenses s’effondrent et meurent d’épuisement. Les invalides miraculés ont trouvé refuge dans une caserne de gardes françaises.
L’attaque de la Bastille a fait 98 morts.
ET A VERSAILLES QUE SE PASSE-T-IL LE 14 JUILLET 1789 ?
« Rien » c’est ce qui est écrit dans le journal de Louis XVI à la date du 14 juillet 1789, journal qu’il remplit tous les jours – une ligne par jour et une page par mois – mais avec un mois de retard, se fiant à ses notes quotidiennes. C’est-à-dire que ce « Rien » inscrit dans ce cahier a été écrit en août 1789 à partir de ses notes du mois de juillet. Ce 14 juillet donc, le roi n’est pas allé chassé et il n’a pas eu de réception ou de cérémonies « Rien ! »
La Reine, elle, est à son château du Petit Trianon tout proche de Versailles mais suffisamment éloigné de la cour pour mener une vie simple et champêtre loin des fastes de Versailles.
La distance entre Paris et Versailles fait que le roi Louis XVI n’est averti que le 15 juillet au matin de la prise de la Bastille. C’est le duc de la Rochefoucauld-Liancourt qui vient dans la chambre du roi annoncer la nouvelle. Ces quelques phrases sont restées célèbres.
Le duc – Sire ? Le roi – Qu’y a-t-il ? Le duc – Les Parisiens ont pris la Bastille. Le roi – C’est une révolte ? Le duc – Non Sire, c’est une révolution !
(1) Le siècle des Lumière (2) Voir mon autre article sur les évènements des 11, 12 et 13 juillet 1789 (3) Les poudres et munitions étaient stockées à l’Arsenal jusqu’au 12 juillet, jour où il a été décidé de transporter tout vers la Bastille endroit mieux protégé dans le cas d’une insurrection populaire. (4) « Prévôt des marchands » : Le terme prévôt vient du latin præpositus, préposé. Au Moyen Âge et sous l’Ancien Régime, le prévôt est un agent du seigneur ou du roi chargé de rendre la justice et d’administrer le domaine qui lui est confié.
<< « Le fardeau des privilèges » (fin 18ème siècle)
<< Le haut Clergé et la Noblesse pesant sur le Tiers-État
Le 14 juillet 1789, le peuple de Paris en colère se fâche, se rend aux Invalides pour prendre des fusils et des baïonnettes puis à la Bastille pour y chercher de la poudre. Il veut du pain, l’abolition des privilèges, l’égalité devant l’impôt, l’accès aux fonctions militaires, civiles et ecclésiastiques pour tous… Il souhaite changer la société et supprimer les injustices mais reste fidèle au roi Louis XVI. C’est le début de la révolte ! Pourquoi une telle rage de changement, pourquoi la révolution ? Pour comprendre, il faut expliquer rapidement la société de cette époque avant le début de la révolution en juillet 1789.
A la veille de la révolution, la France compte 26 millions d’habitants environ.
En 1661, Louis XIV, après la mort de Mazarin son premier ministre, choisit de gouverner seul et décide de mener seul la politique de son pays. C’est un pouvoir autoritaire, une monarchie absolue qui va durer jusqu’en 1789 avec Louis XVI. Il dirige avec l’aide de ministres mais c’est lui qui décide. Le roi a presque tous les pouvoirs. Pourquoi « presque » ?
Louis XVI en costume de sacre peint par Antoine François Callet >>
– Parce que, comme je vais l’expliquer ci-dessous, la société est organisée depuis des siècles en de nombreuses communautés, corporations qui ont leurs propres lois privées et coutumes sur lesquelles le roi ne peut guère intervenir.
– Parce qu’il existe des Parlements -dans chaque région de France- qui ont le droit de faire des « remontrances » au roi, c’est-à-dire des remarques sur les lois qu’ils sont chargés d’appliquer. Le plus important des parlements étant celui de Paris. Celui-ci devient petit à petit le symbole de résistance à la monarchie absolue et pourtant il défend en premier les intérêts de la noblesse et du clergé -les membres du parlement au bout d’un certain temps finissent même par être anoblis par le roi-.
– Parce que, lors de crises financières ou politiques qui nécessitent de lever des fonds ou d’augmenter les impôts, il est bon pour le roi de s’assurer l’appui des 3 ordres qui divisent le pays : le Clergé, la Noblesse et le Tiers-État. Les représentants de ces trois ordres viennent de toutes les régions de France. Ces assemblées exceptionnelles convoquées selon le bon vouloir du roi sont appelées les « États généraux« . Ils ont été créés en 1302 sous le règne de Philippe le Bel et ont été convoqués souvent en temps de guerre dans les siècles passés. En 1484 sont créés les « Cahiers de doléances » qui permettent aux Français d’exprimer leurs soucis, leurs plaintes (doléances) et les vœux qui pourraient améliorer la situation du royaume.
En mai 1789, deux mois avant le début de la révolution, Louis XVI convoque les États généraux. Les représentants des 3 ordres de toutes les provinces de France ramènent 50 000 cahiers de doléances avec beaucoup de témoignages de fidélité au roi mais aussi beaucoup de plaintes et de revendications. La dernière assemblée des 3 ordres s’était produite en 1614 soit 175 ans auparavant !
Mais le roi n’a de compte à rendre à personne sauf à Dieu. C’est un pouvoir absolu de droit divin. Il peut emprisonner toute personne qui ne lui convient pas sans avoir à se justifier.
Une monarchie absolue signifie que les 3 pouvoirs sont dans les mains du roi :
– le pouvoir législatif (celui de créer des lois)
– le pouvoir exécutif (celui de faire appliquer une loi)
– le pouvoir judiciaire (le droit de rendre la justice, c’est-à-dire de juger et de rendre son verdict)
Les revenus de l’Etat
– Les impôts royaux s’ajoutent aux impôts dus au Clergé et à la Noblesse et le peuple -le tiers-état- est asphyxié par les impôts. Je vous propose de lire le détail des différents impôts royaux, seigneuriaux et du clergé ici. Parmi les impôts royaux, il y a la « gabelle », l’impôt sur le sel qui permet de conserver les aliments et il y a la « taille » impôt direct payé par le peuple seulement, le Clergé et la Noblesse ne le paient pas. C’est l’impôt le plus lourd. Pour donner une idée, sur un revenu de 100 livres, l’état en prend 53 et certaines fois cet impôt peut être augmenté selon la folie dépensière de l’état.
La société de l’ancien régime : une société complexe avec ses propres lois et coutumes
LA SOCIÉTÉ DE L’ANCIEN REGIME EST UNE SOCIÉTÉ COMPLEXE FORMÉE DE CORPORATIONS, DE COMMUNAUTÉS, DE COMPAGNIES…
Le roi n’a pas vraiment tous les pouvoirs parce qu’il existe de multiples privilèges, règles, coutumes et lois privées propres à de nombreuses communautés, compagnies ou corporations de la société française. Et ces communautés sont innombrables ! Quelques exemples :
– les municipalités des villes
– les communautés d’habitants de villages ou de paroisses
– les communautés de marchands
– les communautés d’arts et de métiers
– les corps d’officiers royaux
– les corps relatifs à la justice (avocats, notaires, procureurs…)
– les compagnies de commerce et de finance
– les corps de médecins, apothicaires (1)
– les communautés religieuses…
Ces nombreux corps possèdent leurs propres droits, libertés et privilèges.
Ces groupes représentent différentes classes sociales qui bénéficient de revenus très différents. En plus, à ces différences, il faut ajouter les mentalités méprisantes des uns vis à vis des autres en fonction du degré de naissance ou de l’appartenance à telle ou telle communauté. Ainsi, la noblesse de cour méprise la noblesse de province, les nouveaux anoblis, les grands bourgeois… Les grands bourgeois (haute finance, banque) méprisent les petits bourgeois (commerçants) qui méprisent le petit peuple salarié qui lui-même jalouse les artisans, boutiquiers… C’est une chaîne sans fin ! (2)
LES 3 GRANDS ORDRES QUI DIVISENT LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE AVANT LA REVOLUTION : LE CLERGÉ, LA NOBLESSE ET LE TIERS-ÉTAT
Cette société de l’ancien régime est une société divisée en 3 corps qui ne sont pas égalitaires. Il s’agit du Clergé, de la Noblesse et du Tiers-État. Le Clergé et la Noblesse ne paient pas d’impôts ou presque pas mais accablent le reste de la population, soit plus de 95 %, avec toutes sortes d’impôts comme la dîme, la taille ou la gabelle.
Adalbéron de Laon (dit Ascelin) est l’auteur du « Poème au roi Robert » écrit entre 1027 et 1030 dans lequel il propose une théorie sur la société qui serait divisée en trois ordres correspondant aux fonctions de chacun. Ainsi, les « oratores » seraient ceux qui prient comme les moines, les prêtres. Les « pugnatores » ou « bellatores » seraient ceux qui combattent -à peine 1 ou 2% de la population-. Et les « laboratores » seraient tous les autres qui travaillent paysans et artisans.
LE CLERGÉ
Le clergé compte environ 120 000 personnes dont 3000 nobles
Le clergé ne paie pas d’impôts au roi mais fait des dons à l’état.
« Clergé » c’est un terme qui désigne les différentes institutions religieuses chrétiennes du pays. Il est composé :
– du haut-clergéqui regroupe les archevêques, les cardinaux, les évêques, les abbés. Ces religieux sont choisis par le roi parmi la noblesse ou la grande bourgeoisie. On reproche au haut-clergé de mener grand train, de vivre avec faste.
– du bas-clergéqui regroupe les curés, les vicaires, et les prêtres issus du peuple. Les revenus distribués au bas-clergé par le haut- clergé sont très inégaux et beaucoup sont misérables.
Le clergé, c’est l’ordre le plus riche des 3 ordres.
Ses revenus :
– Le clergé possède environ 6% du territoire français ce qui lui apporte des revenus conséquents.
– Il prélève un impôt appelé « la dîme » qui oblige les paysans à donner un dixième de leurs récoltes et dans certaines régions quelques fois plus.
– Il accepte les dons des fidèles.
– Il reçoit l’argent des quêtes pendant les offices.
Sa fonction est :
– De veiller au respect des règles religieuses. La religion catholique est celle de l’état et du roi. La vie des Français est encadrée par la religion de la naissance à la mort. C’est l’armature sociale. Chaque corps de métier à un Saint Patron protecteur.
– De lutter contre les hérétiques en demandant l’aide du roi certaines fois.
– De condamner les livres jugés contraires à la foi religieuse.
– De tenir les registres d’état civil c’est-à-dire d’inscrire les naissances, les décès, les mariages…
– D’assurer l’enseignement de la petite école à l’université.
– D’assister les malades et les pauvres dans les hôpitaux et les hospices.
LA NOBLESSE
La noblesse compte environ 80 000 familles soit 400 000 personnes
À Versailles au 17ème siècle, sous le règne de Louis XIV – le Roi Soleil – on comptait jusqu’à 10 000 courtisans.
Leurs titres : Prince ou Princesse de sang royal / Duc ou Duchesse / Marquis ou Marquise / Comte ou Comtesse / Vicomte ou Vicomtesse / Baron ou Baronne / Chevalier / Ecuyer
La noblesse ne paie pas d’impôts au roi ou très peu.
Pour être reconnu comme noble il faut :
. soit être né(e) de père noble et dans ce cas apporter la preuve de sa noblesse. Le XVIe siècle est beaucoup moins exigeant sur les preuves à apporter que le XVIIIe siècle qui demande 3 ou 4 quartiers de noblesse. C’est sans doute aussi ce qui a isolé progressivement cet ordre très protégé.
. soit, si l’on n’est pas noble de naissance, être anobli par le roi.
Dans les deux cas, ce sont les familles en fait qui sont nobles ou anoblies et non les individus seuls.
Ce n’est pas une classe homogène. On distingue plusieurs catégories de nobles
Il y a la grande noblesse(environ 4000 familles) ou la noblesse de cour qui vit à la cour auprès du roi. Depuis le roi Louis XIV à Versailles, la grande noblesse a été « domestiquée ». Elle vit auprès du roi qui la neutralise en lui procurant des fêtes, des jeux, de l’oisiveté et de temps en temps des obligations militaires. Elle a les postes les plus honorifiques, les plus hautes charges (évêque, officiers supérieurs, ministres…) à fortes rémunérations, et touche aussi de fortes pensions. Elle mène un train de vie fastueux avec un nombre important de domestiques, vit dans le luxe et fait des dépenses excessives dans les multiples fêtes, représentations théâtrales, chasses organisées dans les châteaux qui les ruinent bien souvent. Bien qu’elle méprise la haute bourgeoisie, cette grande noblesse trouve de grands avantages financiers à faire alliance (mariages) avec ces riches roturiers qui en retour reçoivent un titre de noblesse. Au XVIIIe siècle, la noblesse de robe -les bourgeois anoblis- cohabitent à la cour avec la noblesse d’épée -la plus respectée et la plus fière de ses origines qui remontent au Moyen-Âge.
Il y a la moyenne noblessequi est une noblesse aisée avec suffisamment d’argent pour résider sur ses terres une partie de l’année mais qui bien souvent possède aussi des hôtels particuliers en ville. Beaucoup de ces nobles mènent une vie mondaine qui ressemble à la vie de la cour. Participent à ces fêtes luxueuses les membres des Parlements – les plus riches de la noblesse provinciale -, les officiers, les hauts fonctionnaires… D’autres nobles aisés préfèrent rester dans leur domaine et s’adonner au plaisir de la chasse.
Il y a la noblesse pauvrequi est plus nombreuse que la moyenne noblesse. Elle vit sur ses terres en province dans des manoirs en ruine quelques fois aussi pauvres que leurs métayers. Ils attendent beaucoup de la générosité du roi et se considèrent supérieurs au monde paysan malgré leur pauvreté.
A l’origine de la noblesse vers le Xe siècle, être noble c’est vivre de ses revenus, c’est servir son roi le plus loyalement possible et servir la paix, la justice et aider à une bonne gouvernance de l’état. Leurs activités et leur conduite doivent être loyales et désintéressées. Il leur est interdit d’exercer une activité utile ou de faire du profit. Les nobles ne fabriquent pas de produits contrairement aux bourgeois et ne font pas de profits.
A l’origine, les nobles étaient dispensés de la plupart des impôts parce qu’ils étaient les seuls à payer l’impôt du sang c’est-à-dire qu’ils étaient les seuls à servir au rang d’officiers et devaient combattre en temps de guerres. Les simples soldats, eux, recevaient une solde. C’était un service rendu à la France, le prix du sang versé. Mais son utilité s’amenuise au fil du temps surtout au XVIIIe siècle qui est un siècle où les guerres diminuent. Beaucoup de gens de la grande noblesse deviennent oisifs devenant une charge pour le peuple et ne donnant aucune contrepartie.
Au XVIIIe siècle, les idées d’égalité se répandent grâce aux philosophes des Lumières (Voltaire, Rousseau, Diderot…). Le peuple est de plus en plus excédé. Il considére ces nobles comme des parasites et leur reproche leur oisiveté.
Les privilèges
– Ils ont des avantages fiscaux c’est-à-dire qu’ils ne paient pas l’impôt (la taille) que tous les roturiers paient.
– Ils ont des impôts directs sur la fortune très allégés.
– Les impôts indirects sur les biens de consommation sont atténués aussi.
– Ils peuvent porter l’épée et avoir des armoiries
– Ils ont des tribunaux spéciaux
– Certains grades d’officiers supérieurs leur sont réservés
– Les hautes fonctions ecclésiastiques sont pour les nobles
Les revenus
– Les droits seigneuriaux – beaucoup de nobles sont des seigneurs possédant un château et des terres. Ils prélèvent : le champart, les banalités, le cens…auprès des paysans et aussi leur imposent des « corvées » comme l’entretien des routes et du château.
La fonction initiale de la noblesse est :
– de se battre, de verser son sang pour la France et être au service du roi.
LE TIERS-ÉTAT
L’ Abbé Sieyès, prêtre et homme politique constatait en 1789 (3) :
Qu’est-ce que le Tiers état? — Tout.
Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique? – Rien.
Que demande-t-il? — À être quelque chose.
Le Tiers-État représente 98% de la population française.
20% à la ville et 80% à la campagne
Ceux qui ne sont pas nobles ni membres du clergé appartiennent à ce troisième ordre représenté lors des assemblées exceptionnelles « les États généraux » (voir explication plus haut dans l’article « le roi « lieutenant de Dieu »). Ils sont appelés les « roturiers ». Toutes les autres activités de la société française se retrouvent dans cet ordre qui est le plus nombreux et qui est extrêmement varié.
On y trouve :
– Des bourgeoissouvent riches et cultivés comme des magistrats, des industriels, des banquiers, des négociants, des entrepreneurs, des commerçants, des artisans indépendants, des médecins, des officiers… C’est une classe sociale qui s’est beaucoup développée depuis le 16e siècle. Certains bourgeois sont très riches et sont évidemment tenté par le pouvoir mais ils ragent de ne pouvoir accéder aux plus hautes charges de l’État réservées à la haute noblesse. Au XVIIIe siècle, les choses changent un peu. Malgré le mépris de la noblesse pour la bourgeoisie, des mariages sont arrangés entre « roturiers » et gens de la noblesse. L’argent du négoce ou de la finance contre un titre de noblesse pour la famille.
Cette classe bourgeoise est très impliquée dans la vie de la société et ouverte aux idées nouvelles. Malheureusement, c’est elle aussi qui s’enrichit par la traite des Noirs – l’esclavage -.
– Le peuple des villes, des artisans, des boutiquiers, des employés, des blanchisseuses, des palefreniers…un petit peuple qui souffre du froid et de la faim en hiver 1788-1789. Les récoltes de l’année n’ont pas été bonnes, les prix ont monté et les salaires ont baissé.
– Des paysansqui représentent près de 20 millions de personnes alors que la population est estimée à environ 25 millions de Français. Parmi les paysans on trouve différentes catégories plus ou moins pauvres comme des ouvriers agricoles, des métayers, des tenanciers de domaines seigneuriaux, des grands fermiers, des journaliers… Dans l’ensemble, les conditions de vie sont très dures pour beaucoup d’entre eux. L’habitat est souvent misérable et les paysans peu instruits vivent dans une précarité économique constante car dépendante de bonnes ou mauvaises récoltes. Ils doivent, en plus de tous les autres impôts, donner une partie des récoltes pour payer la dîme au Clergé et une autre partie pour payer le champart au Seigneur qui détient les terres.
– Des pauvres qui n’ont pas de domicile, pas de profession ou sont en situation précaire comme les domestiques qui sont payés à la journée. Ce sont des enfants abandonnés, des femmes perdues, des vieillards, des infirmes qui deviennent des vagabonds, des mendiants, des voleurs en bandes quelquefois. Ils sont enfermés dans des hôpitaux généraux« Les hôpitaux sont la honte et le supplice des pauvres » écrit Saint Simon en 1720. A Paris, en 1790, sur une population de 600 000 habitants, on compte environ 200 000 parisiens en situation précaire, 20 000 qui vivent au jour le jour sans savoir ce qu’ils vont manger et où ils vont dormir.
(1) « apothicaire » : ancien mot pour « pharmacien »
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